Parce qu’il « considère que les femmes migrantes en Europe doivent avoir l'opportunité de se rencontrer, de s'organiser et de s'exprimer pour promouvoir leurs droits », le Lobby Européen des Femmes a lancé le programme « Mêmes droits, mêmes voix » qui leur est spécifiquement destiné. La première étape de ce projet a été d’initier un dialogue avec les femmes leaders dans les communautés migrantes de l’Union Européenne et d’autres associations actives dans le domaine de l’immigration, lors d’un séminaire qui s’est déroulé à Bruxelles en janvier 2007.
Pour Kirsti Kolthoff, présidente du LEF, cette initiative est l’occasion « d’écouter les préoccupations et les défis vécus par les femmes migrantes dans les pays de l’UE, et, ensemble, d’étudier comment traduire ces préoccupations en recommandations adressées aux responsables politiques européens ».
Les différentes coordinations nationales du LEF ont ensuite eu la charge de rendre compte dans chaque pays des échanges tenus à Bruxelles. En France, la coordination a désigné le Forum Femmes Méditerranée pour remplir ce rôle de passeur. L’ONG a ainsi organisé en septembre une « Réunion nationale des associations de promotion des droits des femmes migrantes », où a été établit un cahier de revendications et d’actions à promouvoir auprès des décideurs. « Renforcer les réseaux est un des objectifs principaux du programme » explique la représentante, Karima Ben Ahmed. « Nous pouvons témoigner de la bonne représentation des associations française lors de cette journée à Marseille. Notre rôle était de dire aux associations qu’elles sont un appui au niveau européen et qu’elles sont encouragées à y faire appel et à s’en référer. »
En effet, dans le cadre de « Mêmes droits, mêmes voix », le LEF se positionne comme un relais d’information et propose de créer des alliances transnationales entre les ONG de femmes migrantes ainsi que des partenariats avec d’autres organisations non spécifiques. Le défi du LEF est aussi «de veiller à ce que les voix diverses et variées des femmes migrantes en Europe soient entendues et prises en compte». Un équilibre délicat sera à trouver entre l’exigence de refléter la multitude des problèmes rencontrés, différents selon la situation et les chemins migratoires de chaque femme, et la nécessité exprimée par Karima Ben Ahmed de « trouver une homogénéité dans les demandes et revendications » pour mieux être audible.
Pour l’heure, la ligne d’action prioritaire est de militer que soit intégrée une dimension de genre dans les politiques migratoires européennes. Pour permettre une amélioration globale de la prise en compte des droits des femmes migrantes, cette analyse de genre devra intervenir « dans les politiques et les actions à chaque stade du processus de migration ». l’étape pré-migratoire, la traversée des frontières et l’intégration dans le pays d’accueil. Le LEF préconise notamment une coopération avec les pays d’origine menée dans le respect des droits humains des femmes comme priorité. Esther Fouchier, présidente du Forum Femmes Méditerranée, regrette en effet que l’UE n’ait aucune exigence dans ce domaine lorsqu’elle met en place des accords de partenariats, au titre que la condition des femmes dans un pays serait considérée comme une particularité culturelle sur laquelle elle n’a pas à intervenir. Elle regrette aussi «des inégalités statutaires entre hommes et femmes qui peuvent être reproduites dans le pays d'accueil, en raison de l’application de dispositions discriminatoires des conventions bilatérales».
Elle recommande sur ce point que la France « prenne modèle sur la loi votée en Espagne en 2003 et qui prévoit que la seule loi applicable sur un territoire donné est la loi du pays où vivent les personnes concernées et pas la loi de leur pays d'origine. » L’échange d’expérience et de bonnes conduites est aussi un des axes du projet européen.
Caroline Hocquard